(L'article publié ici est un extrait, il ne traite pas des Marianne de Luquet)
François Guilbaud a reçu deux propositions d'articles sur le même sujet et a demandé aux auteurs de mettre en commun leurs analyses et de confronter découvertes, interprétations et points de vue afin d'en faire une synthèse.
À l'origine de cet article, il y a la découverte par Dominique Stéphan de l'aspect inhabituel de la vignette des PAP au format 220*110 du TVP Luquet "LA POSTE" du lot B4J 01 00705 et de seulement celui-ci (publié le 15/07/03 sur son site http://www.timbre-poste.com/). Cette même observation a également fait l'objet d'un "Encart Original" de l'Amicale Philatélique de Cusset rédigé par Jean-Jacques Rabineau.
Cette découverte en a entraîné d'autres, nous a amené à nous interroger et à réexaminer des pièces. Le résultat a pris de l'ampleur et nous vous le livrons ici. Il nous a conduit à expliquer les principes des différentes méthodes d'impression, mais aussi à proposer une nouvelle classification qui prend en compte à la fois le dessin et la méthode de fabrication. En l'absence d'information précises de l'ITVF, beaucoup des informations ici sont conditionnelles et sujettes à interprétation et, sauf oubli, sont indiquées comme telles, et ce malgré la lourdeur que ces précautions entraînent souvent !
Bonne lecture et relectures...
La taille-douce est un procédé d'impression par les creux : le cylindre porte le dessin à l'envers, l'encre (épaisse) est déposée au moyen de rouleaux toucheurs (un par couleur), puis essuyée de façon à ne garder l'encre que dans les tailles. La forte pression exercée et l'humidification du papier permettent à l'encre de se déposer. Cette impression se caractérise par un léger relief visible en lumière rasante, caractéristique de ce mode d'impression. Elle ne permet pas les à-plats ; ceux-ci sont rendus par des lignes diagonales entrecroisées plus ou moins serrées. Cette technique est dite sécurisée, en effet les presses taille-douce ne sont pas répandues. Seule l'impression en grandes quantités permet de rentabiliser les coûts matériels et humains.
Il y a deux procédés de confection des viroles : mécanique et numérique.
La technique de fabrication des cylindres fait appel à des moyens purement mécaniques. Le graveur a à sa disposition un bloc d'acier doux. La maquette est reproduite photographiquement sur cette plaque, le graveur l'utilise pour dessiner les contours avant d'éliminer la couche photographique. La gravure ne pardonne pas les erreurs (elles obligent à tout recommencer). Elle demande des compétences rares et plusieurs semaines. À ce titre il est très exceptionnel en taille-douce de faire plusieurs poinçons originaux : à l'exception des premières années d'introduction de cette technique à l'Atelier, seul le 2,20 Liberté a fait l'objet de 2 poinçons-transfert réalisés à partir du poinçon original (sans valeur ni signatures).
Le poinçon terminé est durci par cémentation et trempage. Une empreinte (donc à l'endroit et en relief) de ce poinçon est transférée par forte pression sur un petit cylindre d'acier doux appelé molette. Cette molette est à son tour cémentée et trempée.
On utilise cette molette pour reporter par pression autant de fois que nécessaire (800 fois pour une virole RGR de feuilles) la gravure sur le cylindre d'impression appelé virole (par opposition aux cylindres fabriqué à partir de coquilles) en cuivre assez tendre. C'est une opération longue et manuelle, elle nécessite des retouches sur ce cylindre (à l'aide d'un brunissoir) car la matière est repoussée sur les bords. La virole est recouverte d'une fine couche de chrome dans un bain électrolytique afin de la rendre plus résistante. Une opération de déchromage-rechromage permet éventuellement de prolonger la vie d'une virole par élimination des défauts d'usure superficiels apparus lors de son utilisation.
Une nouvelle méthode de confection des viroles a été introduite avec la Marianne de Briat ; on en sait peu de choses ; voilà ce que dit le livre Impression/Expressions édité par l'ITVF :
Le principe de ce procédé est de transformer l'image gravée d'un poinçon en un fichier informatique par le biais de la photographie. Afin d'obtenir le meilleur résultat possible, on remplit d'encre les tailles du poinçon, on essuie la surface, puis on réalise une prise de vue à l'aide d'un appareil numérique. Le film est ensuite comparé à l'épreuve issue du poinçon. Ce film étant jugé satisfaisant, le fichier informatique est transféré sur la virole par gravure électromécanique.
On constate que le fichier informatique ainsi obtenu est une image en 2 dimensions alors que le poinçon est en 3 dimensions : le graveur peut en effet utiliser des variations de profondeur, même si cette possibilité s'est amoindrie avec l'industrialisation. L'imprimerie part d'un modèle prévu pour la taille-douce car elle est ainsi certaine d'obtenir une image adaptée à cette technique : c'est-à-dire sans à-plats, avec des traits d'une largeur entre l'épaisseur minimale et maximale possible en taille-douce, et en évitant les lignes verticales impossibles en raison de l'essuyage. Elle numérise le poinçon encré car le rendu est plus précis que la numérisation d'une épreuve. En effet à l'impression les traits ne sont pas aussi nets (par capillarité, défaut d'essuyage ou manque d'"amour" du papier). On constate cependant qu'au final, on a besoin d'une image en 2D sur l'ordinateur (un "poinçon virtuel").
Donc, le moyen d'obtenir cette image pourrait être différent de la photographie du poinçon : une maquette au trait, agrandie et adaptée à la taille-douce, est sans doute moins longue à réaliser que la confection d'un poinçon dont on n'aurait plus besoin ; il semble cependant que pour le moment un poinçon ait toujours été gravé.
Une machine à commande numérique grave la virole en utilisant une pointe diamantée. Cette pointe (dite pic-vert) percute à haute vitesse et haute fréquence (800 coups par seconde) la virole en cuivre dur de façon à expulser - et non pousser - la matière. Une première machine OHIO (du nom du fabricant) a été mise en service, une deuxième plus performante d'origine allemande (la HELL) l'a été par la suite. Par analogie avec d'autres procédés d'impression - comme l'offset ou l'héliogravure - on peut penser que cette machine se base sur un fichier modèle qui comprend l'ensemble des timbres et inscriptions du cylindre.
Le principe d'impression est similaire à la lithographie (une méthode d'impression à plat au moyen d'une plaque en pierre), on parle souvent de "lithographie offset" : il est basé sur l'antagonisme entre l'eau et les corps gras. L'encre grasse adhère au dessin mais pas aux surfaces vides humides. C'est une impression par la surface, sans relief (la typographie est une impression par les reliefs, la taille-douce une impression par les creux). Elle permet les à-plats de couleur.
La chaîne graphique actuelle se déroule en plusieurs étapes :
Les plaques d'impression sont des tôles métalliques (aluminium ou zinc) ensuite cintrées sur les cylindres. L'impression n'est pas directe mais utilise un cylindre intermédiaire en caoutchouc baptisé blanchet, tout comme pour la taille-douce indirecte (si l'empreinte suivante ne se trouve pas exactement au même endroit, on a une double impression, une faible et une normale). L'objet de ce cylindre est de permettre l'impression sur du papier normal (non couché, granuleux).
L'offset est un procédé économique mais n'est pas sécurisé. En effet, la technique est répandue, le résultat final peut servir à constituer la matrice pour la fabrication de faux.
Pour sécuriser les PAP, l'imprimerie a souvent ajouté une image à gauche du timbre ; elle est en bleu (c'est la couleur utilisée en édition pour les parties que l'on ne veut pas voir sur le résultat final, comme illustration plus médiatisée il y a le fameux "fond bleu" au cinéma pour mixer 2 images) et comporte une image latente (l'inscription "CONTREFAÇON") qui apparaît dans certaines tentatives de reproduction (comme les photocopies... en noir et blanc !).
Un cylindre rouge imprime le timbre et un cylindre bleu le dessin à gauche : il y a des différences (forme et couleur) sur cet autre cylindre mais elles sortent du cadre de cette étude.
Ce type d'impression habituellement utilisée par les photocopieurs numériques et les imprimantes bureautiques a aussi été utilisé par l'ITVF. Il s'agit d'une méthode informatique : l'ordinateur envoie à l'imprimante des commandes interprétées par cette dernière. Au moyen d'un laser et de 4 couleurs (les 3 primaires et le noir), l'image est reproduite sur un cylindre intermédiaire en contact avec le papier. Au final, l'image polychrome obtenue est constituée de points comme pour l'offset. Mais les méthodes de tramage sont souvent différentes, la répartition des points étant moins géométrique que pour l'offset classique.
Comme nous l'avons vu, nous avons à faire à 4 techniques qui donnent 4 résultats suffisamment différents pour que les philatélistes arrivent dans la plupart des cas à les reconnaître. Les passerelles entre ces technologies existent : poinçon pouvant utilisé comme modèle et utilisation d'une image informatique pour la gravure numérique, l'offset et l'impression laser.
C'est un nouveau terrain de recherche, où ce ne sont pas seulement les poinçons physiques qui sont importants mais aussi ces images informatiques qui sont de véritables "poinçons virtuels" utilisés pour la gravure numérique, l'offset et le laser.
Il demande de nouvelles classifications, de nouveaux termes. Peut-on garder le mot "type" ? Nous le croyons.
Nous pensons également qu'il y a au moins deux notions à prendre en compte pour l'étude :
Le déroulement des paragraphes sera le suivant :
La Marianne de Briat voit naître la gravure numérique : surprise sur une présentation inédite des TVP Briat : les timbres issus des carnets de 20 (dit DAB pour Distributeur Automatique de Billets) ont une particularité : un trait ferme le cadre en bas alors qu'il est absent sur les autres présentations du TVP. La présence de ce trait en bas n'est pas caractéristique de la gravure numérique, suivant les timbres il est présent ou pas, seul le TVP existe avec et sans ce trait.
Rapidement nommé type 2 par les philatélistes (type N2 dans notre classification), il ne s'agit pas réellement d'un type au sens strict (issu d'un nouveau poinçon physique, comme pour le 2,20 Liberté), mais le résultat de la nouvelle méthode de confection numérique des viroles.
Gravure de la dernière émission de la Marianne de Briat.
D'autres valeurs de la Marianne de Briat ont été réalisées par gravure numérique, ce sont le 3,80 bleu (la gravure classique a été utilisée pour le 3,80 rose de la première émission) et le 4,50 rose de la dernière série, émis sous cette forme uniquement. Il existe enfin le 2,70 sur certaines présentations :
La présence des autres timbres (le TVP type N2, le 4,50 connu uniquement dans cette présentation) valide la confection numérique de ces documents. De plus, il existe des différences significatives (et très visibles sur le 2,70) dans le dessin des valeurs faciales.
Gravure classique (type C1) : 7 biseauté à droite et trait sous la virgule se terminant au milieu du carré supérieur.
Gravure numérique (type N2) : 7 droit à droite et virgule arrondie se terminant à gauche du carré supérieur.
Gravure classique (type C1) : virgule épaisse, boucle intérieure du 3 arrondie en bas à droite.
Gravure numérique (type N2) : virgule différente moins épaisse, boucle intérieure du 3 aplatie en bas à droite.
La maquette originale de la Marianne du Bicentenaire (nom officiel de la Marianne de Briat) est basée sur des lignes verticales plus ou moins serrées pour figurer le drapeau français. Elle a du être adaptée pour les presses taille-douce de l'ITVF : le timbre émis présente des lignes diagonales, entrecroisées pour les parties sombres (le bleu et rouge du drapeau tricolore). Un poinçon similaire à la maquette a été gravé par Pierre Forget mais ne convenait pas (les tailles verticales se vidaient à l'impression). Il n'a pas été utilisé pour réaliser le poinçon virtuel du bloc "Les Visages de Marianne", cadeau donné pendant quelques mois pour des commandes supérieures à 60 euros auprès du Service Philatélique. L'absence de la signature Forget (seule celle de Briat est présente) est un indice, les variations des hachures verticales au centre au dessus de la faciale sont une confirmation qu'il s'agit d'une copie de la maquette.
Un autre poinçon de Jumelet, utilisant toujours des lignes entrecroisées plus ou moins serrées et profondes selon l'intensité voulue, n'a pas servi.
Par contre, pour l'impression des prêts-à-poster (nom mercatique qu'a inventé La Poste pour présenter les entiers postaux comme une nouveauté, on utilise le sigle PAP), le dessin est directement issu de la maquette : l'impression offset est utilisée pour les PAP, au type F3 selon notre classification.
Détail d'un PAP impression offset (type F2) présentant le trait fermé en bas et des lignes entrecroisées
Les philatélistes attentifs ont remarqué que les PAP réalisés sur papier fort, la vignette TVP (bleue ou rouge ; en 3 tailles : normale, moyenne et grande) est similaire au type N2 des timbres du carnet de 20 et non pas au dessin des PAP (type F3) ! Cette constatation laisse à penser que le poinçon virtuel destiné à la gravure numérique a aussi servi pour l'offset (ou l'inverse, quelle est la présentation imprimée en premier ?). Nous affectons le type F2 à ces PAP.
Il fallait, pour bien comprendre la Marianne de Luquet, examiner la Marianne de Briat qui a introduit les nouveaux matériels utilisés à Périgueux, même si les techniques ont certainement évolué depuis.
La suite (les Marianne de Luquet "LA POSTE" et "RF" dans le bulletin du 2ème trimestre 2004...
Dominique Stéphan / Jean-Jacques Rabineau (1ère partie extraite du bulletin n°67 du 2ème trimestre 2004)
Marianne de Cheffer : timbre-poste ayant déjà servi
Marianne à la Nef : coin daté sans barre
Marianne à la Nef : impression lourde
Simili pli accordéon sur carte postale : Marianne de Gandon
Feuille complète TD3 du 0,50 Marianne de Bequet
Carnet non-émis Marianne de Bequet
Repère de coupe et repère électronique
Epreuve d'artiste de la Semeuse de Piel
Epreuve de la Marianne de Munier
Valise diplomatique Marianne de Luquet
Faux 2,30 Marianne de Briat sur contravention
Lettre frontalière 0,25 Marianne à la Nef
Affranchissement composé 25F Marianne à la Nef/Fréjus
Marianne à la Nef : variétés de la surcharge Fréjus
Coin daté non-dentelé, Marianne à la Nef Fréjus
Pli accordéon de gomme sur Marianne à la Nef
Marianne à la Nef surchargé Fréjus : raccord
Épreuve de la Marianne de Hourriez
Bulletin du 2ème trimestre 2009
Erreur de numérotation au dos d'une roulette du TVP Bleu autocollant Marianne de Beaujard
Bulletin du 1er trimestre 2009
Erreur de numérotation au dos d'une roulette du 2,30 Marianne de Briat
2 € Marianne de Luquet sans BP sur lettre
Pli accordéon Marianne de Luquet (PAP Réponse)
Epreuve de la Marianne de Muller bicolore
0,70 Marianne de Luquet RF sans BP
Carnet Cocotte Marianne de Lamouche
Mise à jour de la pièce de septembre 2008 : Carnets Sagem "de feuille"
Reprise des mises à jour du site après une petite parenthèse... Relecture et propositions (et rappels de propositions !) d'articles/pièces du mois bienvenues !
Pièce de juillet 2008 : Epreuve d'état de la Marianne de Beaujard
Pièce d'août 2008 : Non-dentelé accidentel partiel de la Marianne de Luquet
Pièce de septembre 2008 : Carnets Sagem "de feuille"
Pièce d'octobre 2008 : Non-émis Marianne de Cheffer : carnet avec barres phosphorescentes
Pièce de novembre 2008 : TVP Marianne de Lamouche annulé
Pièce de décembre 2008 : Essai d'impression rotative
Carnet non-dentelé accidentel TVP Marianne de Briat
Bulletin du 1er trimestre 2008
Triple pli accordéon sur 6F Marianne de Gandon
10c Semeuse verte, S de POSTES retouché sur carte postale
2,30 Marianne de Briat de carnet fermé sans PHO
Nouvelle Marianne par Yves Beaujard
0,50 Marianne de Béquet piquage à cheval sur lettre
Copyright © 2001-2009
Cercle des Amis de Marianne